Entre l’ouverture d’une enquête visant plusieurs de ses clips et de ses chansons et l’éventuelle suppression de sa discographie sur les plateformes de streaming, le rappeur français Freeze Corleone est dos au mur.
Tout s’est enchaîné très vite pour Freeze Corleone. Depuis la sortie de son album LMF (la menace fantôme), le 11 septembre dernier, le MC français d’origine sénégalaise est dans la tourmente. Il a suffi que la Licra (Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme) balance un tweet déplorant les textes de l’auteur de F pour que la classe politique s’empare du sujet. Le député Éric Ciotti (LR) espère sur Facebook que ce “prêcheur de haine” soit “radié de toutes les plateformes numériques et ses chansons de haine interdites à la diffusion”. Même le nouveau ministre français de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a annoncé que son département “étudie au plus vite les recours juridiques pour poursuivre leur auteur”.
Il n’en fallait pas plus pour que le parquet de Paris ouvre, le 17 septembre dernier, une enquête pour “provocation à la haine raciale” et “injure à caractère raciste” au sujet de plusieurs clips et chansons du co-fondateur du collectif 667. Moins de 24 heures plus tard, le label Universal Music, qui était le distributeur de Freeze Corleone, a annoncé la rupture du contrat le liant à l’artiste. “La sortie de cet album a révélé et amplifié des propos racistes inacceptables”, peut-on lire dans un communiqué officiel. Comme si un label n’écoutait pas un album avant de le distribuer… Mais passons. Cette situation n’a pas empêché l’auteur de Freeze Raël de péter les scores avec son album LMF qui s’est écoulé à plus de 26.000 exemplaires lors de sa première semaine d’exploitation.
Qui est Freeze Corleone ?
Présenter Freeze Corleone peut nécessiter des heures d’écriture. Mais rassurez-vous, Laklika va droit au but à l’image d’un Florian Thauvin face au PSG. Actif depuis une dizaine d’années, ce rappeur est considéré comme l’un des pionniers français de la drill (un sous-genre du rap qui est né à Chicago). Gorgée de références, sa musique n’a jamais suivi le courant du mainstream. Pour en savoir plus sur le bonhomme et sa musique, on vous invite à découvrir ci-dessous cette excellente vidéo de notre confrère Le Réglement.
Et alors que la popularité de cet artiste âgé de 28 ans ne cessait de grandir, le voilà poursuivi par la justice française. Ce samedi 19 septembre, son manager a annoncé sur Twitter que toute la discographie de Freeze Corleone pourrait disparaître d’ici lundi de toutes les plateformes de streaming (Deezer, Spotify, Apple Music…). Rien que ça.
Le rap, une fiction à géométrie variable ?
Mais le cas de celui qui a passé une partie de son enfance au Sénégal et au Canada interroge. Car si le rap est un genre musical qui s’impose comme le leader de l’industrie du disque, il reste à ce jour celui qui subit durement les foudres de la justice. Que ce soit à Paris, à Casablanca ou à Tunis, nombreux sont les rappeurs à avoir relancé le débat autour de la “mythique” liberté d’expression.
Au-delà du prétendu message anti-juif de Freeze Corleone, doit-on aujourd’hui prendre les paroles des rappeurs à la lettre ? Les MC ont-ils vécu tout ce qu’ils rappent ? Ces questions peuvent légitimement se poser. Surtout quand on sait qu’en France, les homosexuels, les femmes, les médias et même la police sont les cibles préférées de la majorité des artistes de la scène rap. Pourtant, ils ne sont pas poursuivis ni condamnés pour leurs propos. Doit-on donc considérer le rapport entre l’art et la responsabilité morale au cas par cas ? Difficile d’y répondre. Au final, il faudrait peut-être voir ces cas de rappeurs devant la loi comme ce qu’ils sont : des volontés politiques encouragées par ceux qui ne veulent toujours pas que le rap soit le genre musical le plus performant. Ou pas…
